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Carnets de Voyage



Re-lisez Tintin au Tibet, re-regardez "7 ans au Tibet" ou alors suivez-nous au fil des jours, des pages, des lettres et des photos, dans la grande aventure que sera ce séjour d'un mois et demi au Ladakh.

Préparation du Départ (oui, avec une majuscule)



Plus que quelques semaines avant le grand départ - il nous faut encore acheter les billets, les visas, les vols et trains internes qui nous conduiront dans l'Himalaya, les chaussures de trek, le bandana tout terrain et la lampe-de-poche-qui-ne-tombe-jamais-en-panne... Tout quoi. 



Après avoir cinq fois frôlé la crise cardiaque en lisant les rubriques "troubles et désagréments", "maladies asiatiques" et autres problèmes liés à l'Inde, l'altitude, les moustiques, la saison, les avalanches, les attaques de yéti et autres délicatesses locales, on en arriverait presque à se prendre pour Rambo (I, II et III réunis) -> Mode "Eye of the Tiger" ON.

Ne craignez pas pour nous, amis de tous horizons, nous vous tiendrons au courant de notre première aventure : l'achat des billets d'avion (Tadam...)

... Et c'est chose faite: départ le 1er août, retour le 17 septembre, emballé-c'est-pesé ON EST PARTIS !


PREMIERES NOUVELLES


9h30 jeudi matin. On s'éloigne de Bruxelles dans un Thalys-tout-terrain en direction d'Amsterdam - les haltes à Anvers et Rotterdam nous dépaysent déjà. Le vol Amsterdam - Delhi se passe sans encombre, au rythme des ronflements de Jacques et des vociférations du voisin de devant qui réclame toujours plus d'alcool à l'hôtesse. "Non monsieur vous ne pouvez pas remplir la petite bouteille d'eau de votre femme avec du whisky" ; "non monsieur, nous ne servons qu'un verre d'alcool à la fois"; "non monsieur vous avez commandé un menu végétarien donc vous n'aurez pas le menu au poulet" etc. Premier aperçu de l'Inde (surtout pour Jacques qui n'y avait jamais mis les pieds) avec l'arrivée à Delhi qui a toujours des airs du festival de Cannes (sans le tapis rouge) : paparazzis, regards et surtout, un petit monsieur arborant la pancarte "BARDING" (ça ne s'invente pas). On n'a pas de photo parce que le dit petit monsieur n'était pas très coopératif et n'a pas trouvé ça aussi drôle que nous.

 

3h du matin. Depuis l'aéroport Indira Gandhi, petit trajet en bus - ô combien romantique - jusqu'au terminus 1 où nous avons poireauté quelques heures avant d'embarquer pour un vol domestique direction Srinagar. Petit stress quand ils nous annoncent qu'on ne peut pas garder nos trépieds en cabine. Finalement ça passe et l'avion décolle... avant de redescendre 1h plus tard (soit 1h30 avant l'heure officielle d'arrivée) au dessus d'un paysage auquel on ne s'attendait pas : rivières et fleuves sortis de leur lits, petites plantations agricoles à perte de vue et seulement trois maisons et demi... Un peu trop "petit" pour que ce soit Srinagar (capitale du Kashmir). On atterrit au milieu de nulle part après quelques belles frayeurs en traversant des turbulences. L'hôtesse blablate quelque chose en hindi ce qui ne fait qu'accentuer notre impression de "on-a-pris-le-mauvais-avion-et-on-est-complètement-largués". Jacques, puit de lumière, notre phare dans la nuit, nous lance "je ne crois pas qu'on soit à Srinagar, j'ai entendu 'chama... ou jama' un truc comme ça..." Et pour cause, nous sommes à Jammu, la capitale d'hiver du Cachemire, bien plus au sud. A moitié vidé de ses passagers l'avion se reremplit peu à peu et nous avons à nouveau droit à l'attaque chimique de décontamination avant de redécoller, direction Srinagar pour de bon. Enfin on espère.

 

10h20. Srinagar-les-flots, tout est kaki et beige, des barbelés dernière technologie offrent une déco accueillante alors que nous sommes encore  plus dévisagés qu'à Delhi. Une série de formulaires nous sont distribués. A la sortie, un essaim d'hommes nous fonce dessus pour nous ramener dans leur boat house "you come nice price, even taxi free. You see, you watch, watching is free, come and see etc". A bord du taxi, on s'arrête soudain pour rencontrer le "cousin" de notre chauffeur, un petit monsieur ayant vécu 5 ans à Pézenas ("very close to Montpellier" - ça non plus on ne l'invente pas - il avait meme un "friend from Bretagne and his name is Didier". Ben tiens.

 

15h. On s'installe enfin. Tout baigne, si ce n'est que l'on n'a pas dormi depuis 48h et que notre fatigue n'a pas résisté à l'accablante - et moite - chaleur de Delhi, ni au poids (pourtant bien optimisé - sauf pour Jacques qui a décidé de prendre les Misérables de Victor Hugo - soit 36000 pages - comme livre de chevet) de nos sacs à dos + sacs à trépieds + sac de matos. Résultat à 14h, on s'endort tous comme des larves, bercés par le vroum vroum du ventilateur. Michel (Jacques), notre lumière, notre phare dans la nuit etc, a eu la bonne idée d'oublier sa brosse à dent ce qui n'améliore pas son humeur (et si ce n'était que ça). Petit à petit le projet prend forme, on s'organise, on en parle avec les kashmiri ; notamment le type qui tient notre guest house et qui semble en avoir gros sur la patate à ce sujet. Le Ladakh fait partie du Kashmir (un état qui a déjà une plus grande autonomie au sein de la république d'inde) mais dispose d'un statut particulier à cause des tibétains qui s'y réfugient et du fait que la Chine le revendique également. Bref, plus on en parle, plus on découvre de nouvelles problématiques très intéressantes. A suivre ! Petite balade le soir sur le dal lake, un gigantesque lac qui doit faire 1/3 de la superficie de la ville, recouvert de lentilles d'eau et sur lequel sont  installés des boat houses : grands bateaux habités - dont certains, transformés en guesthouse, ont un style propret-européen : petits napperons et compagnie.

Mais le meilleur est à venir... car nous repartons finalement à 5h30 pour prendre un bus vers Kargil (l'étape obligatoire vers Leh, pour que les organismes s'habituent à l'altitude. Srinagar est à 1800m, Kargil à 2800 et Leh à 3500m) - notre bus, charmant vestige de la guerre du Vietnam aux poussiéreux fauteuils et aux vitre crasses, arrive 2h plus tard, dans un fracas de tôles. C'est parti pour 10h de tape-cul et de poussiérisation intensive dans un paysage de plus en plus sauvage. Au bout de quelques heures, l'ascension vers Kargil commence. Notre chauffeur qui nous paraissait normal au début, a progressivement révélé sa folie : à hurler à chaque fois qu'il actionne le klaxon (toutes les 10secondes), à faire du 80km/h quand il y a 5cm de marge avec le bord (et 200m avant le fond du précipice) et surtout, à ne pas manger, ni boire (Ramadan oblige) alors qu'il conduit un bus sur la 2ème route la plus haute du monde (véridique) pendant des heures, en pleine cagnasse, aves 2 pauses en 13h de route ! On a ainsi grimpé plusieurs centaines de mètres dans une ambiance lunaire, avant de se retrouver bloqués au sommet du col par un glissement de terrain. On a du redescendre la moitié pour négocier avec l'armée, le passage par une autre route.

Le voyage a en tout duré 13h (pour deux petites centaines de kilomètres). Les montagnes sont énormes et magnifiques, parfois abruptement coupées comme une part de gâteau. Les ombres des nuages bougent sur les versants gris, bruns, noirs et rosés - de temps en temps une petite oasis de verdure apparaît entre les cols ; quelques rivières y serpentent parfois - ce sont des paysages magnifiques !

Arrivée à Kargil. C'est la rupture du jeûne et une ambiance fiesta a fait sortir les gens de chez eux. L'arrivée de notre bus a été subtilement annoncée par les coups de klaxons furibards de notre cher chauffeur, et c'est en super stars que nous traversons Kargil (si ce n'est que nos tronches sont a peu près aussi ravagées que le bus lui-même). L'option dodo du jour : une guest house qui n'avait de "house" que le nom: la moitié du bus y a dormi: dans le hall, par terre, avec d'autres "copains indiens" et une petite famille ladhaki. La salle de bain était certainement l'une des plus DEGUEULASSES qu'il m'ait été donné de voir (sur une note de 1 à 10, je met 1, soit à peu près la note que l'on donne aux chiottes de trains apres 40h d'usage). La petite fenêtre qui permettait à toute la ville de zieuter l'intérieur de la "salle de bain" était cassée et donnait sur des poubelles. En gros, après la douche, on avait l'impression d'être encore plus sales qu'avant. Etant donné qu'il n'y avait pas de cadenas, Gaetan et moi avons préféré rester pour zieuter les sacs et le matos quand les autres allaient manger. Pendant ces quelques heures où nous sommes restés dans le hall, les gamines de la famille ladakhi qui partageait aussi le hall, n'ont pas cessé de faire des aller-retours entre leur matelas et nos duvets pour nous proposer des chips ou un biscuit, à chaque fois qu'elles en ouvraient un paquet.

Le lendemain matin, redépart à 5h30 pour un autre crapahutage à travers les sommets. A quelques heures de l'arrivée (= avec 9h de bus dans le dos, des fourmis dans les jambes, le corps en origami, la tronche pleine de poussière et les nerfs un tout petit peu à cran) le bus est arrêté par un barrage. On nous explique qu'il y a un shooting. Nous: "Un shooting ? Comment ça un shooting ? QUI shoot QUI ici !?" (sachant que l'armée indienne est omniprésente et que les armées pakistanaise et chinoise ne sont pas loin, il y avait de quoi s'affoler). On échange des regards alarmés, prêts à taper la crise d'angoisse de l'année, à pleurer, à hurler à se lacérer les joues, regrettant déjà de ne pas faire un reportage sur les Légos en Belgique... Et puis quelqu'un nous précise : "yes, bollywood shooting ! A film ! You like Bollywood ?" -> Aaaaaan mais fallait le dire ! (Que oui on a aimé bollywood à ce moment là).

 

Arrivée à Leh, touriste-city, des baba-cools, des cheveux longs, des "je marche pieds-nu-dans-la-crotte-de-chiens", des shakira /rahan et xena en puissance. Et quelques familles plus "normales", sponsorisées Décathlon, prêtes à trekker jusqu'au bout de la nuit. Leh coûte cher, on ne s'y attendait pas du tout. Le projet avance mais on a pas mal de bâtons dans les roues : c'est la croix et la bannière pour choper une carte SIM (indispensable pour nos contacts), et zéro internet donc on n'en sort pas. On a tous la tête un peu en vrac à cause de l'altitude : quelques essoufflements et vertiges au début, mais c'est vite passé et il ne reste quasi plus que ces petites palpitations de temps à autres, quand on marche un peu vite ou qu'on remonte une pente. Par contre le manque d'oxygène entame un peu nos capacités cérébrales - en gros, on passe par des passages à vides (plus communément appelés : crises d'idiotie profonde, d'électro-cardiogramme plat) durant lesquelles on n'arrive pas à articuler, on inverse les syllabes des mots ou on fixe le vide pendant 20 bonnes secondes avant de s'en apercevoir. La réflexion est laborieuse...

 

Sans tomber dans la généralisation "à la louche", certains jeunes ladakhi qui bossent avec les touristes semblent avoir des dollars à la place des yeux. Et en même temps comment leur en vouloir : la quantité de touristes qui étalent leurs "richesses" avec ostentation, le défilé de mode qui anime quotidiennement les rues, les bobos écolos, les touristes-plus-indiens-que-les-indiens.... tout ici est un cliché ambulant : des bijoux, des habits, des affaires de treks, des german bakery, des croissants, des browies, des milk shake, des menus "israëlien, mexicain, coréen, européen", des claviers d'ordinateur pour écrire en hébreu.... TOUT est fait pour les touristes. Leh n'appartient plus aux Ladakhi, c'est un gros mélange entre le souk de Marrakech (enfin, l'image que je m'en fais) et Décathlon. Il y a un énorme fossé entre les générations ; les ladakhis plus âgés restent très souriants, gentils, tranquilles et "bons". Tout le monde dit bonjour, il y a une véritable façon de penser "collective" (quasi inexistante dans le reste de l'Inde). On peut même se permettre des marques de politesses sans passer pour Queen Elizabeth. Vraiment, que ce soit au Cachemire ou au Ladakh, les gens étaient bien plus agréables que dans les régions de l'Inde centrale que l'on connaissait. Des abricotiers poussent un peu partout et les fruits, plus petits que chez nous, sont délicieux. Ils sont déclinés en abricots sec, confitures, gelées, pâtes, gateaux et autres confiseries. On essaie au maximum de découvrir la gastronomie tibétaine : momos (délicieux beignets de légumes /poulet légumes /fromage patate, cuits à la vapeur), tukpa, soupes "bouillon" avec plein de légumes émincés, des épices et de la coriandre, thentukp autre soupe similaire à la tukpa, avec de large pâtes... tous les plats existent en version "veg" et en version "avec viande". On s'habitue peu à peu à tous ces noms étrangers (sauf Jacques qui a eu la bonne idée d'appeler l'un de nos interlocuteurs "thentukp" (soupe) plutôt que "Thupstan" (son vrai nom). Il s'est fait un copain.

 

On a tous pris de fameux coups de soleil et avons enfin changé de chambre dans la guest house - désormais nous logeons dans des chambres séparées, "moyen-de-gamme" situées au bout d'un couloir qui sent le mouton bouilli et situées de part et d'autres d'un petit temple bouddhiste tout kitsho-mignon. Nulle doute que Jacques regrette le temps où on dormait tous dans la même chambre, l'époque où il avait droit à des draps à fleurs roses.

 

En gros, tout va bien, on est efficaces dans le boulot, les interviews, les plans vidéos, et chaque contact que l'on rencontre nous en procure d'autres donc tout semble se dérouler comme du papier à musique. On marche beaucoup, on sue beaucoup, on râle et on se marre aussi beaucoup. Travailler sur ce projet nous permet de voir et de comprendre (petit à petit) le Ladakh. Nous pensons rester encore 10 bons jours à Leh pour finir nos interviews, et puis bouger dans la campagne pour découvrir le "vrai Ladakh" (s'il existe encore quelque part). En attendant, nous avons fait un petit détour par un festival organisé par l'ONG "women's alliance" - au programme : danses, chants, ventes de produits locaux etc. On y a dégusté de petits pains précuits sur une grande tôle, post-cuits dans les cendres et nettoyé d'un bon gros crachat, made in mamie ladakhie. Un dé-lice ! Les images s'accumulent, dans nos têtes et sur les cartes SD. On a certainement une bonne étoile car les choix les plus "au pif" nous dirigent vers de supers rencontres : hier, le simple fait de décider de ne pas prendre de taxi pour aller vers notre destination, nous a permis de passer par le "All India Radio", d'y rencontrer la fille d'un célèbre chanteur et "homme culturel" ladakhi, que nous avons immédiatement contacté, puis interviewé (ce matin) dans un cadre idyllique avant qu'il ne nous fasse découvrir les camps de réfugiés tibétains de Choglamsar où nous invités - dans une école locale - pour filmer le spectacle-kermesse de l'année. On a assisté à la préparation des gamins tout excités (costume et maquillages inclus), on les a vu répéter avec un mélange de sérieux et de rire, on a vu les mamans préparer leurs enfants et tous les autres, à la chaîne... Le spectacle a commencé à 7h30 avec danses, chants et petites pièces de théâtre à la gloire du Dalaï-Lama. C'était adorable, drôle et finalement très émouvant. Journée EPUISANTE mais riche en images et en émotions.

Aujourd'hui, Dimanche 18, on a eu la chance d'interviewer le président d'une association qui s'occupe des problèmes de santé (physique et mentale) liés au changement brutal du mode de vie dans la région. Encore un personnage intéressant et profondément gentil, avec qui nous sommes restés discuter autour d'un jus de mangue (je donne tous les détails, on s'y voit mieux) à propos de la période coloniale, de l'indépendance, d'une époque dont on ne connait rien. Les journées sont parsemées de moments d'exceptions comme celui-ci et de petits bugs made in india qui font le charme du coin (pas sûr que Gaëtan approuve) : coupure d'électricité, pas d'internet, les odeurs, la chaleur, le froid, pas d'eau chaude, les habits qui puent, la pluie qui inonde les routes et fais remonter les "égouts", les marches de 5h dans la pampa himalayenne vers un interlocuteur décisif (qui, quand on l'a finalement trouvé, finit par refuser l'interview pour la reporter à 2jours plus tard), les pizzas pas fraîches à la pâte trop dure, etc.

 

Et puis il y a les gens qui rythment notre quotidien : les adorable serveurs d'un petit resto dans lequel on va très souvent manger, leur gentillesse et leur humour, les sourires et la bonne humeur de la famille qui tient la guest house, les gens que l'on a déjà interviewé et qui nous reconnaissent dans la rue avec plaisir, les petits vieux et petites vieilles, notre copain Marco - un italien qui bosse pour une chaine TV de Berlusconi à Rome et qui profite de ses 3 mois de vacances annuels pour "s'évader vers de meilleurs horizons" - encore un portrait atypique : il a commencé à bosser dans le porno avec Rocco Sifredi avant de rencontrer le Dalaï Lama tout à fait par hasard lors d'un voyage en Inde, ce qui lui a donné l'envie de faire un grand docu sur le bouddhisme en Asie.

 

Il nous reste encore pas mal de choses à faire à Leh et puis on commencera nos petits trips de 2-3 jours. D'ici là, on espère avoir la possibilité de poster cet email qui prend des allures de roman !

NEWS II LE RETOUR

22 jours en Inde - nous voilà à la moitié du voyage et on a l'impression d'être ici depuis des mois ! La coupure internet/facebookienne y est certainement pour beaucoup et ça fait du bien. La très grande majorité des interviews "officielles" sont faites, il nous faut maintenant un peu plus d'humain et pour ça, EXIT Leh-city !

 

Le 23, nous voilà donc partis pour Alchi, un petit village à l'ouest de Leh, sur la route vers Srinagar, où se trouve un ensemble de temples bouddhistes du 11ème siècle, "absolutely amaaaaaazing" comme disent les américains. Nous voilà donc partis à 6h du matin, à la recherche d'un taxi-jeep prêt à passer la journée là bas (c'est à 2h de route) avec nous et notre copain Marco dont c'était l'anniversaire. La route était encore une fois magnifique, et les temples à la hauteur de leur réputation : de superbes vieilles peintures ornent les murs intérieurs - bouddhas bleus peints aux pigments de lapis lazuli, mandalas immenses et multicolores... D'habitude la déco des temples bouddhistes à quelque chose d'un peu kitsh mais là c'était tout simplement magnifique ("absolutely amaaaaaazing"). Par contre, photos interdites donc je n'ai pu faire que des captures d'écran de vidéo (d'où la pauvre qualité des clichés).

 

Leur beauté n'a été gâchée que par l'insupportable odeur de pieds de notre guide (forcément on enlève les godasse à chaque visite - mais finalement, je crois que cette règle fait plus de mal que de bien aux temples). Seul Michel peut rivaliser avec un tel parfum plantaire : jusqu'à présent, on a résisté à la tourista, aux toilettes ladakhi, à l'altitude, à la bouffe et aux boissons périmées, mais il se pourrait bien que les pieds de Michel nous achèvent. "Tués par une odeur de pieds". On a profité d'être à Alchi pour faire un détour par l'énorme barrage hydro-électrique qui alimente le Ladakh en électricité. Impressionnant.

 

Le lendemain, départ à 6h30 avec un couple d'amis (un belge et une espagnole) baroudeurs et grand amateurs de treks. On leur avait raconté notre projet après les avoir rencontré lors d'une interview (eux font du bénévolat pour une ONG chargée de tester l'eau potable et ont réalisé un film sur l'une des organisations à laquelle nous nous étions aussi intéressés). On leur avait parlé de notre besoin d'images "rurales" et notre envie de nous BARRER de Leh et ils nous ont proposé une expédition de 3 jours dans la montagne. Bien que l'on ne s'y soit pas vraiment préparés on s'est dit que ce serait une bonne idée ; ce qui nous (r)amène à ce matin du 24 août, à 6h30, où nous attendions tous les trois, la tête dans le sac, la jeep qui devait tous nous conduire au point de départ du trek, à 2h de route de Leh. Comparés à Charles et Yurena, on avait vraiment des tronches de trekkeurs du dimanche : Gaëtan avec un tout petit sac à dos plein à craquer (ce qui lui donnait un ptit air de tortue ninja), sa casquette de guindaille et ses combat-shoes de GI-joe-décathlon ; Jacques avec son bob mou et déformé, ses ray-ban en plastiques made-in-india, ses runnings de foot et deux chaussettes différentes, et moi, sans chapeau, avec un sac Eastpack déjà pourri par des années d'école et des chaussures de rando dont la semelle commençait déjà à dire "bonjour" au début de la marche. Plus nos trépieds en bandoulière. On aurait pu illustrer "la rando pour les nuls" alors qu'à côté de nous (enfin, en tête de peloton), Charles et Yurena, équipés d'énormes sacs à dos, sponsorisés North-face et dont les t-shirts étaient assortis à leurs bâtons de marches qui EUX-MÊMES étaient assortis à leur housse de sac (la grand toile qu'on tend quand il pleut). Le contraste était saisissant.

 

Et nous voilà partis, cahin-caha, trottant gaiement (comprends "laborieusement") derrière nos guides, en longeant des rivières et en les traversant parfois (scoop du jour : à 3500m, les rivières ne sont pas chaudes). Premiers jours, 700m de dénivelé, un petit stop dans un "parachute café" (trois chaises devant un comptoir en bois, sous une grand bâches blanche) pour boire un black tea pas très black avant de repartir vers notre première étape : Romback, petit village de 10 maisons et 3 chambres d'hôtes, entouré de champs de blé allant du vert clair au jaune vif, dans lesquels paissent ânes, vaches, dzô et yacks (le dzô est un mélange de vache et de yack ; pour ce qui est du yack, en gros, c'est le lévrier afghan des bovins : beaucoup de poils, beaucoup d'allure, la vitesse en moins). Après s'être posés et avoir englouti à cinq, 4 chapati au fromage de yack (un truc un peu aigre, comme de la faisselle en grosses miettes) le tout arrosé d'un black tea toujours pas très black, on a exploré les environs. Avec le soleil qui se couchait et l'ombre des nuages qui passait sur les montagnes, c'était - encore une fois - un paysage magnifique. Le soir, repas servi à 7h : petite soupe claire aux oignons et petit pois, suivie d'un sabji (curry) patate-petits pois, d'un dhal (lentilles) et de riz. On a tout englouti. Alors qu'on venait de se mettre à table, on s'est rendus compte qu'on avait perdu Jacques. Et là je me suis rappelée qu'il était allé voir ses nouveaux copains : des travailleurs kashmiri venus à Romback pour faire des briques toute la sainte journée. Bien sûr, on commence à imaginer le pire (pour le bien de la famille de Jacques, on ne va pas décrire tout ce que l'on a imaginé à ce moment là). Résultat, je me tape le sprint de l'année, en descente dans la montagne, sur un chemin en cailloux (autant dire qu'avec l'élan, je courais comme un pantin, les bras en avant, les jambes désarticulées etc. Ca a bien fait rire les gens du villages. Je débarque devant la tente des travailleurs, hors du village au milieu de nulle part en beuglant "Jaaaaaaaaacques !!" et là je l'entends tranquillou papoter avec sa bande de copains, sirotant un petit chaï en jouant aux cartes. Ils m'ont prise pour une vieille harpie qui leur enlevait leur nouveau pote mais il a bien fallu ramener Michel à la table pour que son altesse prenne des forces avant l'ascension qui nous attendant le lendemain. Après ce festin ladakhi, dodo express au rythme des ronflements de Michel et de ses râles de phacochère (le pauvre petit a le nez bouché depuis qu'il est en altitude). Au matin, première épreuve pour Gaëtan, les toilettes ladakhis : un rectangle découpé dans le sol, de 4 bons coups de pelles et qui donne sur une salle "de réception" en dessous. Des toilettes sèches (forcément, vu le climat, on oublie la chasse d'eau : ça gèlerai 8 mois par an) qui se transforment en composte à grand renfort de sciures de bois, terre et autres crottes d'animaux balancées à la pelle. Ingénieux mais pas très confo.

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